"Tichèlbè" : quand le corps dit non à la violence par la danse
Jeudi 24 mai 2018, le public de l’Institut français en Haïti découvrait « Tichèlbè », un spectacle de danse qui traite de la condition féminine, du corps de la femme dans l'espace public et de son rapport à l'homme. Pour l’artiste chorégraphe haïtienne, Kettly Noël, l’objectif est de sensibiliser chacun et chacune grâce à la pratique de la danse contemporaine et du théâtre. Une initiative éducative et artistique qui touche des jeunes issus de toutes les couches sociales de Port-au-Prince et qu’a choisi de soutenir la Mission des Nations unies pour l’appui à la Justice en Haïti (MINUJUSTH).
Organisés dans le cadre du « Port-au-Prince Art Performance (PAPAP) », les laboratoires de Kettly Noël cherchent, selon ses propres mots, à « stimuler le changement social et favoriser un développement humain par la créativité ». Sur scène, des tôles rouillées encadrent un décor dans lequel évolue un couple. L’homme est brusque dans ses mouvements tandis que la femme qui semble gênée par son propre corps rase les murs.
Autour de ce duo parfois tendre et parfois violent, Kettly Noël raconte l’histoire d’une révolution. Tout bascule quand la femme reprend finalement le dessus sur l’homme qui la frappe. Devenue affirmée, elle renverse la situation et prend son destin en main.
Violences basées sur le genre : déconstruire les stéréotypes avec la danse
Pour sa créatrice, la performance de « Tichèlbè », une œuvre qui a remporté le Prix RFI-danse 2003 et le 3ème prix aux 5èmes Rencontres chorégraphiques de l’Afrique et de l’Océan Indien (Sanga III), sonne aussi le coup d’envoi d’un projet de sensibilisation des jeunes mis en place entre le 24 mai et le 6 juin 2018.
Son idée ? Sensibiliser les jeunes filles et garçons sur les violences basées sur le genre à travers l’initiation à la pratique de la danse contemporaine et de l'interprétation théâtrale. À travers la danse et le jeu de scène, Kettly Noël entend amener les jeunes à prendre conscience des mécanismes de la domination masculine. Provoquer chez chacun et chacune une réflexion sur les stéréotypes machistes au cœur des actes de violence sexistes.
Chaque atelier est l’occasion de confronter les corps, les attitudes, les comportements. De les questionner ensemble, en duo, en miroir de « Tichèlbè ». Engager les esprits dans une danse des idées.
Ainsi, du 24 mai au 6 juin, Kettly Noël organise 14 jours de laboratoires d'initiation pour ces jeunes des quartiers de Bel Air, Cité Soleil et Carrefour mais aussi Petionville et Delmas car la violence ne connaît pas les frontières géographiques ou sociales. Une démarche artistique engagée qu’elle destine à cette nouvelle génération, actrice du changement des constructions sociales, pour stopper les mécanismes de violence.