Visite officielle : la Sous-Secrétaire générale des Nations unies Mme Bintou Keita se rend en Haïti

En février 2018, la Sous-Secrétaire générale Mme Bintou Keita s’est rendue pour la première fois en Haïti. © Leonora Baumann / UN / MINUJUSTH

En février 2018, la Sous-Secrétaire générale Mme Bintou Keita s’est rendue pour la première fois en Haïti. © Leonora Baumann / UN / MINUJUSTH

Pour Mme Bintou Keita, les conditions carcérales sont « insoutenables » pour les détenus mais aussi pour les personnes qui travaillent en prison. © Leonora Baumann / UN / MINUJUSTH

Pour Mme Bintou Keita, les conditions carcérales sont « insoutenables » pour les détenus mais aussi pour les personnes qui travaillent en prison. © Leonora Baumann / UN / MINUJUSTH

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15 fév 2018

Visite officielle : la Sous-Secrétaire générale des Nations unies Mme Bintou Keita se rend en Haïti

David Nieto

Du 5 au 9 février 2018, la Sous-Secrétaire générale aux opérations de maintien de la paix des Nations unies s’est rendue pour la première fois en Haïti. L’occasion pour Mme Bintou Keita de réaffirmer l’importance du partenariat étroit entre l’ONU et les institutions haïtiennes mais aussi de renforcer l’État de droit et les droits de l’Homme dans le pays.

Centrée autour de l’appui à la Justice, la mission de maintien de la paix créée en octobre 2017 par le Conseil de Sécurité est présente en Haïti pour une durée limitée. D’ici octobre 2019, la MINUJUSTH (Mission des Nations unies pour l’appui à la Justice en Haïti) a pour objectif d’accompagner la professionnalisation de la Police nationale d’Haïti (PNH) et le renforcement des institutions de l'État de droit, y compris les secteurs de la justice et des services correctionnels tout en assurant la promotion et la protection des droits de l'Homme — y compris les questions d’égalité et d’équité de genre.

À son arrivée à Port-au-Prince, la Sous-Secrétaire générale a tout d’abord tenu à rencontrer les partenaires nationaux pour déterminer les jalons fédérateurs du renforcement de l'État de droit, condition indispensable de la transition vers la fin de la MINUJUSTH en 2019. Dans ce but, Mme Bintou Keita a rencontré plusieurs parties prenantes. À commencer par le Président de la République S.E. Jovenel Moïse.

Appuyer le renforcement de l’état de droit en Haïti

Le 6 février 2018, Mme Bintou Keita a été reçue au Palais national où elle a rencontré l’exécutif.  Le Président Moïse et le gouvernement Lafontant ont réaffirmé leur engagement à profiter de la fenêtre d’opportunité des deux ans du mandat de la MINUJUSTH pour faire avancer le pays en matière d’État de droit.

Les dysfonctionnements de la chaîne judiciaire mettent en péril la stabilité et le développement durable en Haïti.

Avec la Sous-secrétaire générale, ils ont discuté des problèmes de corruption, d’impunité et de surpopulation carcérale ainsi que du manque d’accès à la justice pour les plus vulnérables. Autant de dysfonctionnements de la chaîne pénale aux graves conséquences sur les droits humains, pouvant mettre en péril la stabilité et la transition vers le développement durable en Haïti.

Au cours de sa visite, Mme Bintou Keita a également évoqué ces sujets avec des membres du Parlement et de nombreuses institutions haïtiennes dont le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire (CSPJ), les Tribunaux de Première Instance de Port-au-Prince et de Jérémie, l’Administration Pénitentiaire, la PNH, l’Office de la Protection du Citoyen (OPC), mais aussi de nombreuses organisations de la société civile dans le secteur des droits de la personne.

Surpopulation carcérale : une situation de crise

Pour Mme Bintou Keita, les conditions carcérales sont « insoutenables » pour les détenus mais aussi pour les personnes qui travaillent en prison. © Leonora Baumann / UN / MINUJUSTH

À l’écoute de chacun de ces acteurs, la Sous-Secrétaire générale a pris note du consensus autour de la nécessité d’un changement profond de la Justice en Haïti : un besoin de renforcer l’inspection et le contrôle pour la reddition des comptes mais aussi de dépolitiser le pouvoir judiciaire pour assurer son indépendance. Au vu de la situation des prisons haïtiennes, elle a également insisté sur l’urgence à agir pour une transition vers l’État de droit.

Lors de son passage à Jérémie, Mme Bintou Keita a souhaité visiter la prison afin de constater à la source les conditions de détention des quelques 304 hommes, femmes et enfants qui y sont incarcérés dans des cellules prévues pour 100 détenus seulement (les standards en Haïti sont fixés a 2,5 m2 par détenu). Une surpopulation que la Sous-Secrétaire générale a décrite comme « insoutenable » dans sa conférence de presse du 9 février à Port-au-Prince.

Sur 304 détenus, 51 seulement ont eu accès à un jugement devant le Tribunal.

Sur les 304 détenus de Jérémie, 51 seulement ont eu accès à un jugement devant le Tribunal. Les 253 autres (83 %) sont encore en détention provisoire faute de n’avoir pu rencontrer un juge. Depuis plusieurs années, cette violation de leurs droits est malheureusement récurrente et commune à l’ensemble des centres de détention du pays.

La Sous-Secrétaire générale s’est pourtant montrée optimiste face aux intentions manifestées par les autorités nationales de relever le défi pour l’avenir que représente la mise en œuvre du 16ème Objectif de Développement durable sur l’importance d’institutions efficaces pour l’accès à la Justice de toutes et tous. Elle a souligné la responsabilité de tous les acteurs, individuellement et collectivement, pour articuler cette vision et identifier les éléments d’actions qui permettront de renforcer l’État de droit.

Bintou Keita a conclu ses rencontres en rappelant l’importance de l’autonomisation et de la responsabilisation des autorités, institutions et organisations de la société civile haïtiennes. D’ici 2019, la MINUJUSTH et l’équipe pays des Nations unies assureront l’accompagnement de leurs initiatives dans ce domaine.